#2 / Repenser nos programmes existants pour tenir compte de l’impact de la crise

17 avril 2020.

Les situations de pauvreté et de fragilités sont au cœur de la mission de l’Action Tank depuis bientôt 10 ans. La crise sanitaire actuelle et ses conséquences économiques révèlent, mais exacerbent également des fragilisations parmi des publics ciblés par nos programmes (demandeurs d’emploi, familles avec jeunes enfants, sans-abris…). Tous nos programmes et projets en développement sont ainsi réinterrogés.

Comment tenir compte de l’impact de la crise sur les ménages fragiles et repenser nos programmes en conséquence ?

 

1) Renforcer la communication sur les programmes qui peuvent apporter une aide immédiate aux publics cibles, afin d’atteindre autant de ménages éligibles que possible.

La fermeture des écoles et l’objectif de continuité pédagogique ont mis en lumière le manque d’équipement et de capacité d’utilisation des outils numériques à la maison pour beaucoup de familles, en particulier les familles pauvres.  L’offre Coup de Pouce Livebox d’Orange, accompagnée par l’Action Tank depuis janvier 2019, et qui propose une offre d’internet à domicile et un ordinateur portable reconditionné pour les familles modestes, voit sa raison d’être renforcée. Les Directions Régionales Orange et les équipes terrains ont ainsi été mobilisées pour accélérer le déploiement au regard de l’urgence des besoins constatés. Il apparaît également nécessaire de favoriser la diffusion du programme dans le milieu éducatif : des prises de contact avec les recteurs d’académie sont en cours.

C’est aussi l’accélération de la prescription auprès des familles qui est visée par le programme Malin (accès à une alimentation infantile de qualité), en envisageant aujourd’hui une mobilisation accrue de la CNAF et des CAF partenaires. Cet objectif viendra compléter l’action de court terme déjà engagée pour recruter des familles, s’appuyant sur l’adaptation du contenu de conseils à la période de confinement (activité des jeunes enfants, accompagnement au développement du fait-maison…).

 

2) Prévenir les effets de la crise sur les bénéficiaires des programmes (baisse de ressources, évolution de la situation d’emploi, isolement…), en adaptant les offres.

Le Club Mobilité, offre de location de véhicule avec option d’achat (LOA) dédiée aux demandeurs d’emploi et travailleurs indépendants précaires, pourrait faire face à une problématique de solvabilité parmi ses bénéficiaires, tenus de s’acquitter de mensualités de paiement. Une flexibilisation de l’offre pourrait être envisagée : blocage temporaire des mensualités, retour du véhicule anticipé, etc. La discussion entre partenaires du Club Mobilité démarre pour étudier les réponses possibles à l’évolution de la situation des bénéficiaires.

 

3) Interroger les modalités de prescription et de souscription des programmes pour les rendre accessibles à des publics qui font face à des situations de rupture.

La situation actuelle se traduit pour certains ménages par des baisses brutales de ressources. C’est le cas des publics intérimaires, des saisonniers, des CDD non-renouvelés dont l’activité s’est subitement réduite ; c’est aussi le cas des publics bénéficiant de l’aide sociale, plus difficiles à atteindre dans un contexte de confinement et de manque d’équipements ou de ressources humaines pour poursuivre les opérations. Des dépenses ont également augmenté et pèsent davantage dans le budget des ménages, comme l’illustre le cas largement médiatisé des dépenses alimentaires en augmentation pour pallier l’absence de cantine scolaire, chez les familles pauvres.

–> Comment repérer les publics en situation de rupture ? Une première piste consiste ainsi à renforcer le repérage des publics fragiles par les bailleurs sociaux partenaires de l’Action Tank : Finistère Habitat, Seine-Saint-Denis Habitat, et à porter plus largement cette démarche de repérage auprès d’autres bailleurs et collectivités, sur la base des expérimentations et des enseignements formulés avec les partenaires actuels.

–> Comment faire évoluer les critères d’éligibilité ? Plusieurs programmes de l’Action Tank reposent sur une éligibilité évaluée selon le quotient familial, le revenu fiscal de référence ou la qualité de locataire du logement social des ménages. Ces trois indicateurs ne prennent pas en compte aujourd’hui les changements de vie brutaux. Peut-on alors imaginer pour les programmes une modalité de souscription alternative qui prendrait compte de l’évolution récente des conditions de vie et du niveau de ressources ? Cette question est actuellement traitée à l’échelle de chaque programme.

–> Quels nouveaux acteurs pourraient être impliqués ? Par exemple pourrait-on s’appuyer sur les banques, aux premières loges pour constater les chutes de ressources de leurs clients ? C’est un levier que l’Action Tank propose d’actionner dans le cadre de son travail auprès des banques du Collectif d’entreprises pour une économie plus inclusive[1] : développer la prescription (par l’information, a minima) d’offres inclusives par les banques auprès de leurs clients fragiles, mais aussi renforcer la prévention du non-recours aux aides sociales. Les modalités d’expérimentation doivent être discutées dans les semaines à venir.

 

La semaine prochaine, nous faisons le point sur les effets de précarisation déjà constatés ou attendus face à la crise Covid19, et sur les pistes de l’Action Tank pour apporter une réponse en lien avec notre mission de développement de programmes innovants de lutte contre la pauvreté.

[1] https://www.usinenouvelle.com/editorial/emmanuel-faber-et-thomas-buberl-sont-ils-les-nouveaux-parrains-d-un-capitalisme-francais-inclusif.N929069